Charte de l'abbaye de Fontenay
Il s'agit de l'une des premières chartes bourguignonnes rédigées en français. Cette région fait appel à la langue vernaculaire plus tardivement que la Lorraine dans ses actes documentaires. On pourra se reporter dans cette perspective aux trois premiers exercices de transcription ayant pour objet les premiers actes lorrains en français. Ce décalage chronologique s'explique sans doute par la présence de nombreuses et puissantes institutions ecclésiastiques en Bourgogne, telles que Cluny, qui utilisaient par tradition le latin.
Le document, daté de 1253, notifie un accord pris entre deux ecclésiastiques (le prieur de Val-le-Duc et l'abbé de Fontenay) concernant la perception d'une redevance annuelle. Le choix du français est ici vraisemblablement déterminé par le caractère informel de l'accord.
Ce texte, court et facile à comprendre, a été choisi comme quatrième exercice dans le but familiariser les personnes dans une première phase d'apprentissage à la fois à la philologie éditoriale et à la scripta non littéraire de l'ancien français.
On remarquera d'emblée que la très grande majorité des mots employés dans cette charte s'est maintenue jusqu'en français moderne. Toutefois, la graphie de ces lexèmes est souvent sensiblement différente de celle que nous connaissons pour leurs équivalents actuels (par exempleantrer, covant ou encore Seignor). Par ailleurs, la variation graphique est un phénomène omniprésent et caractéristique de l'écrit régional en ancien français (= les scriptae). Le Moyen-ge galloroman ne dispose en effet d'aucune norme prescriptive, que ce soit à l'oral ou à l'écrit. Cela signifie concrètement que la graphie d'un même mot peut varier dans un manuscrit d'une ligne à l'autre et cette variation peut être, suivant les cas, le reflet ou non d'une variation à l'oral. Le lent processus de standardisation du français (qui mènera à l'élaboration de la variété semi-artificielle qu'est la langue standard actuelle) ne s'enclenchera que beaucoup plus tard, à partir du 16e siècle et ne s'imposera à l'oral véritablement dans toute la France qu'après la seconde Guerre Mondiale.